lundi 28 juin 2010

De l'Avre au Saint-Laurent : un roman-fleuve !

Ci-contre : au Mont-Saint-Michel (cliquer sur l'image pour l'agrandir). Né à Tillières-sur-Avre en 1505, chanoine de Paris et futur cardinal, c'est en tant que comte-évêque de Lisieux et Grand Aumônier de France que, le 8 mai 1532, Jean Le Veneur accueille François Ier venu en pèlerin. Il en profite pour présenter au roi le navigateur Jacques Cartier, parent de l'un de ses moines. Et pour lui vanter ses mérites afin de « conduire des navires à la découverte de terres nouvelles dans le Nouveau Monde (...) en considération de ses voyages en Brésil et en Terre-Neuve ». L'expédition aboutira, en 1534, à la prise de possession du Canada.

Ci-contre : l'église de Montigny-sur-Avre. Né le 30 avril 1623 et baptisé le jour même dans cette église consacrée par son père Hugues, François de Laval est devenu le chef de la branche cadette de la deuxième maison des Montmorency-Laval en 1645. Ordonné archidiacre d'Évreux, il est d'abord pressenti pour partir vers l'Asie du Sud-Est quand des religieux réclament sa venue au Canada. Nommé premier évêque du Québec, et deux fois gouverneur de la Nouvelle-France par intérim, il a par huit ou neuf fois effectué la traversée de l'Atlantique et mené une vie toute de dévouement et de dévotion jusqu'au jour de son décès à Québec, où il est inhumé, le 6 mai 1708. Il a été béatifié le 22 juin 1980 par Jean-Paul II.

Ci-contre : plaque visible dans le baptistère de l'église de la Madeleine à Verneuil-sur-Avre (cliquer sur l'image pour l'agrandir). L'acte de baptême de Paul Bertrand est ainsi rédigé dans les registres de cette église : « Novembre 1661. Le 27e jour a été baptisé par nous vicaire soussigné, Paul Jean fils de Jean Bertrand et Marie Nelz, levé par noble homme Paul Beurier sieur de Cougnay assisté de Anne Marc parrain et marraine. » Signé Esnoult, avec paraphe. Ci-dessous : signature et paraphe de Paul Bertrand dit Saint-Arnaud.
Rares sont les rues du Nouveau-Monde (une dizaine en France). Celle-ci est située derrière l'église de la Madeleine. Un bureau d'engagement y était-il ouvert pour les candidats au grand voyage ? Nul ne le sait mais, avant et après Paul Bertrand, d'autres Vernoliens ont embarqué pour la Nouvelle-France, dont le bonnetier Maurice Auzou, Pierre Bénard, Michel-Louis Falenpin Dufresne et Jacques Petit. Trésorier des troupes de la marine, ce dernier inventa la « monnaie de cartes ». Il est à noter que Verneuil était autrefois une ville-porte qui s'appelait Verneuil-au-Perche. Or les patronymes des Canadiens français sont souvent issus des confins de la Normandie et du Perche : ainsi, les noms si répandus des Juchereau, Gagnon, Giguère, Mercier, Pelletier, Rivard et Tremblay y trouvent leurs origines (les ancêtres de M. Raymond Lévesque sont de Dieppe et Hautôt-Saint-Sulpice).

Ci-contre : monument érigé à Sainte-Geneviève de Batiscan, au Québec (cliquer sur l'image pour l'agrandir). Après s'être engagé dans l'un des régiments de Vaudreuil, Paul Bertrand combat les Indiens iroquois et les Anglais puis devient cultivateur à Batiscan, un village qui porte le nom d'un affluent du Saint-Laurent, en épousant Gabrielle Baribeau le 3 juin 1697. La terre qu'ils ont labourée n'a jamais été perdue par leur famille, qui s'y réunit désormais chaque année.

Un an avant sa naissance, le père de Paul Bertrand avait acquis le droit d'exploiter l'hostellerie vernolienne du Pot d'Étain. En 1732, Paul apprit qu'il en avait hérité par la lettre d'un cousin. Il dut intenter un procès transatlantique pour récupérer son bien, ce que lui permit le Parlement de Rouen. L'établissement fut vendu en 1733. Il a déménagé par deux fois depuis lors et s'est transformé en brasserie, mais l'enseigne du Pot d'Étain existe toujours à Verneuil-sur-Avre...

Ci-contre : quelques-uns des Saint-Arnaud venus à Verneuil en 2006. Pourquoi Paul Bertrand portait-il le surnom de Saint-Arnaud ? Mystère. Il n'en reste pas moins que la majorité de sa filiation l'a adopté pour patronyme, avec beaucoup de variantes : St-Arnauld, St-Arnault, St-Arnaux, St-Arneault, St-Arnold, St-Arnou, St-Arnould, St-Arnoult, St-Arnoux, Santineau, Santana, etc. Sa progéniture a essaimé jusqu'en Louisiane et formidablement prospéré, au point que ses descendants se comptent de nos jours, après dix ou onze générations selon les cas, au nombre recensé de vingt-cinq mille pour un nombre total estimé à cent mille.

Inauguration de l'allée Paul-Bertrand dit Saint-Arnaud en 2006. De gauche à droite : MM. Louis Petiet et Christian Perron, conseiller général et maire de Verneuil, et Mme Yolande Saint-Arneault, présidente d'Adbstar.

Notre incontournable sentiment d'appartenance réciproque tient aussi au sacrifice de jeunes Canadiens venus combattre pour notre liberté. L'un d'eux est l'aviateur Donald Dufton (ci-contre), né le 10 décembre 1922 à Toronto (Ontario). Le Halifax à bord duquel il volait a été abattu à Verneuil-sur-Avre le 13 août 1943. Tout comme ses coéquipiers britanniques, il a été enterré dans le cimetière de cette ville mais sa tombe est restée anonyme, sa dépouille n'ayant pu être identifiée. Nous lui rendrons l'hommage solennel qui lui est dû à la date anniversaire de son décès, jour d'ouverture de notre festival, en présence de 9 membres de sa famille dont ses frères James et Joseph.

Un an et quatre jours plus tard, un autre drame endeuillait la ville de Verneuil-sur-Avre encore occupée par les Allemands. Le 17 août 1944, soit moins d'une semaine avant la libération définitive de notre cité, cinq résistants et le parachutiste canadien qu'ils avaient recueilli étaient arrêtés, torturés et fusillés par les nazis au fond du parc de la mairie (où a été élevée la stèle ci-contre). Hector Phillip Sylvestre, né le 14 septembre 1921 à Sturgeon Falls, dans l'Ontario lui aussi, avait un ancêtre originaire de Pont-sur-Seine qui s'était installé au Québec en y épousant Barbe Nepveu l'an 1667. Il appartenait à une unité d'élite : le 1st Canadian Parachute Battalion (3rd Parachute Brigade, 6th Airborne Division). Dans la nuit précédant le Débarquement, il avait été largué non loin de Cabourg. Sa mémoire et sa tombe seront dignement honorées le jour anniversaire de son décès, que nous avons choisi pour cela comme date de clôture de notre festival, là encore en présence de plusieurs de ses parents.

Ci-contre : 7e Congrès international de France-Canada, à Verneuil, les 30 et 31 mars 1957 (cliquer sur l'image pour l'agrandir). Au 1er rang, de g. à d. : MM. le Dr Mahieu, maire de Verneuil ; de Felice, secrétaire d'État aux Affaires étrangères ; Pierre Mendès France, député de l'Eure et ex-président du Conseil des ministres ; et René Garneau, attaché culturel à l'ambassade du Canada (futur ambassadeur auprès de l'Unesco). Au 2e rang : M. Raymond Laurent (ancien ministre, président de France-Canada et député de la Manche) et Mme Magali Corradot (écrivain et fondatrice de la section locale de France-Canada). Venant de la mairie, le cortège se rend à l'église de la Madeleine, où va être célébrée une messe solennelle. À cette occasion, le chanoine Salaville prononcera un prêche sur le mariage d'amour qui lie la France et le Canada.

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